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Page:Bernardin de Saint-Pierre - Paul et Virginie, Didot, 1806.djvu/263

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PAUL

représentant ce qu’elle devoit à sa mere et aux habitudes du premier âge ; qu’elle en avoit été traitée de fille insensée dont la tête étoit gâtée par les romans ; qu’elle n’étoit maintenant sensible qu’au bonheur de revoir et d’embrasser sa chere famille, et qu’elle eût satisfait cet ardent desir dès le jour même, si le capitaine lui eût permis de s’embarquer dans la chaloupe du pilote ; mais qu’il s’étoit opposé à son départ à cause de l’éloignement de la terre, et d’une grosse mer qui régnoit au large, malgré le calme des vents.

À peine cette lettre fut lue que toute la famille, transportée de joie, s’écria : « Virginie est arrivée » ! Maîtresse et serviteurs, tous s’embrasserent. Madame de la Tour dit à Paul : « Mon fils, allez prévenir notre voisin de l’arrivée de Virginie ». Aussitôt Domingue alluma un flambeau de bois de ronde, et Paul et lui s’acheminerent vers mon habitation.

Il pouvoit être dix heures du soir. Je venois d’éteindre ma lampe et de me coucher, lorsque j’apperçus à travers les palissades de ma cabane une lumiere dans les bois. Bientôt après j’entendis la voix de Paul qui m’appeloit. Je me leve ; et à peine j’étois habillé que