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Page:Bernardin de Saint-Pierre - Paul et Virginie, Didot, 1806.djvu/264

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ET VIRGINIE

Paul, hors de lui et tout essoufflé, me saute au cou en me disant : « Allons, allons ; Virginie est arrivée. Allons au port, le vaisseau y mouillera au point du jour. »

Sur-le-champ nous nous mettons en route. Comme nous traversions les bois de la Montagne-longue, et que nous étions déja sur le chemin qui mene des Pamplemousses au port, j’entendis quelqu’un marcher derriere nous. C’étoit un noir qui s’avançoit à grands pas. Dès qu’il nous eut atteints je lui demandai d’où il venoit, et où il alloit en si grande hâte. Il me répondit : « Je viens du quartier de l’isle appelé la Poudre-d’or : on m’envoie au port avertir le gouverneur qu’un vaisseau de France est mouillé sous l’isle d’Ambre. Il tire du canon pour demander du secours, car la mer est bien mauvaise ». Cet homme ayant ainsi parlé continua sa route sans s’arrêter davantage.

Je dis alors à Paul : « Allons vers le quartier de la Poudre-d’or, au-devant de Virginie ; il n’y a que trois lieues d’ici ». Nous nous mîmes donc en route vers le nord de l’isle. Il faisoit une chaleur étouffante. La lune étoit levée ; on voyoit autour d’elle trois grands cercles noirs. Le ciel étoit d’une obscurité affreuse.