Je trouvai une voiture de poste qui consentit, à prix d’or, à me conduire au premier train qui passait.
Là, je pus me caser tant bien que mal, mais, arrivée à Bordeaux, impossible de trouver cinq places dans l’express. Mon intendant obtint de monter près du chauffeur. Mme Guérard et ma femme de chambre se casèrent je ne sais plus où, et moi j’entrai dans un wagon où se trouvaient empilées neuf personnes.
Un vieil homme laid voulut repousser mon petit garçon que j’avais introduit dans le wagon, mais je le repoussai violemment à mon tour, disant : « Pas une force humaine ne nous fera descendre de ce wagon, entendez-vous, vieil homme laid ! Nous sommes là, nous y resterons ! »
Une grosse dame, qui prenait plus de place à elle seule que trois personnes ordinaires, s’écria : « C’est gai, on étouffe déjà. C’est honteux de laisser monter dans un wagon onze personnes, quand il n’y a place que pour huit. — Eh bien, descendez, dis-je en me retournant vivement, et, vous partie, on ne sera plus que sept ! »
Le rire étouffé des autres voyageurs me fit comprendre que j’avais gagné mon auditoire. Trois jeunes hommes m’offrirent leur place ; je refusai et déclarai que je resterai debout. Les jeunes hommes se levèrent et déclarèrent qu’ils resteraient debout. Aussi, la grosse dame héla un employé : « Monsieur l’employé ! écoutez... » — L’employé s’arrêta hâtivement, le pied prêt à continuer sa marche.
« C’est honteux ! monsieur l’employé, nous sommes onze dans ce wagon ! Il est impossible de se mouvoir.
— N’en croyez pas un mot, monsieur l’employé,