ducteurs allemands avaient été changés contre des conducteurs français.
Alors, je m’informai, et j’appris que Paris était troublé par des mouvements révolutionnaires. Le chauffeur, avec qui je causais, était un être très intelligent et très avancé. « Vous feriez mieux, me dit-il, d’aller ailleurs qu’à Paris, car, d’ici peu, on se cognera. »
Nous étions arrivés. Je descendis avec ma smala de la locomotive, au grand ahurissement des gens de la gare. Je n’étais plus bien riche, mais j’offris vingt francs à un homme d’équipe qui consentit à prendre nos six valises. Nous devions faire chercher ma malle et celles de ma famille, le tantôt.
Mais à cette heure où pas un train n’était attendu, impossible de trouver une voiture... Les enfants étaient si fatigués... que faire ? J’habitais rue de Rome, n° 4, ce n’était pas loin, mais ma mère ne marchait presque jamais, étant dolente avec un cœur très faible ; et les bébés étaient si, si fatigués, avec leurs yeux bouffis mal ouverts, et leurs petits membres devenus gourds par le froid et l’immobilité.
Je commençais à me désespérer ; mais une voiture de laitier passant, je la fis héler par l’homme d’équipe. « Vingt francs pour prendre ma mère et les deux bébés et les conduire, 4, rue de Rome ? — Et vous aussi, ma petite demoiselle, me dit le laitier ; vous êtes plus maigre qu’une sauterelle, vous ne pèserez pas lourd en surplus. » Je ne me le fis pas dire deux fois, quoique un peu vexée.
Après avoir installé maman, un peu hésitante, près du laitier, et les bébés et moi dans la voiture, assise entre les bidons de lait vides et pleins, je dis à notre conducteur : « Ça vous est égal de revenir au-devant