Page:Bernhardt - Mémoires, ma double vie, 1907.djvu/34

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cheveux. Ma cousine m’envoyait des baisers du bout de la table.

Tout à coup, la voix musicale de mon père me fit tourner la tête vers lui. « Écoute, Sarah, si tu es bien sage au couvent, je te reprendrai dans quatre ans et je t’emmènerai avec moi, bien loin, faire de beaux voyages. — Oh ! je serai bien sage ! sage comme tante Henriette ! » C’était ma tante Faure. Tout le monde sourit.

Après le dîner, le temps étant beau, on se dispersa dans le parc. Mon père m’emmena et me parla de choses graves, de choses tristes que j’entendais pour la première fois, que je comprenais malgré mon jeune âge et qui me faisaient pleurer.

Il s’était assis sur un vieux banc et me tenait sur ses genoux. Ma tête appuyée sur sa poitrine, j’écoutais et je pleurais, silencieuse et troublée… Mon pauvre papa, je ne devais plus le revoir, jamais, jamais…