Page:Bernhardt - Mémoires, ma double vie, 1907.djvu/497

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il ne livrait que celles qui pouvaient donner au public l’idée de sa paternelle bonté à mon égard, etc., etc..


La plaidoirie de maître Allou eut un grand succès : il réclamait trois cent mille francs de dommages et intérêts, plus la confiscation, au profit de la Comédie, des quarante-trois mille francs qu’elle me devait.

J’avais pour avocat maître Barboux, ami intime de Perrin. Il me défendit mollement. Je fus condamnée à payer cent mille francs de dédit à la Comédie-Française ; de plus, à perdre les quarante-trois mille francs confiés par moi à la sollicitude de l’administration.

Je dois dire que je ne m’occupai guère de ce procès.


Trois jours après ma démission, je vis apparaître Jarrett. Il me proposait pour la troisième fois un contrat pour l’Amérique. Cette fois, je prêtai l’oreille à ses propositions. Nous n’avions jamais parlé chiffres, et voici ce qu’il me proposa : cinq mille francs par représentation et la moitié de la recette en surplus de quinze mille francs ; c’est-à-dire que le jour où la recette atteindrait vingt mille francs, je toucherais sept mille cinq cents francs. De plus : mille francs par semaine pour mes frais d’hôtel ; de plus, un Pulman spécial pour mes voyages, contenant ma chambre, un salon dans lequel devait se trouver un piano, quatre lits pour mon personnel, et deux cuisiniers pour me faire la cuisine pendant la route. M. Jarrett toucherait dix pour cent sur toute somme perçue par moi... J’acceptai tout. J’avais hâte de quitter Paris.

Jarrett envoya de suite une dépêche à M. Abbey, le grand imprésario d’Amérique, et celui-ci débarquait treize jours après. Je signai le contrat fait par Jar-