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au large de l’écueil

Ayez pitié d’elle qui n’espère pas le rendez-vous du ciel !…

— Mais tu ne comprends donc pas ce que c’est pour moi, le spectacle de mon fils implorant grâce pour la fille d’un sectaire !… Quel est cet amour qui te fait te traîner à ses pieds ?…

— Aie pitié, Augustin, je t’en supplie, sanglote la mère. Je te le répète, tu regretteras cela plus tard…

— Ayez pitié, mon père, balbutie Jeanne, dont les joues roses ne le sont presque plus. Ils s’aimèrent un jour, et c’est déjà fini, leur joie profonde… Cela briserait leurs âmes de ne s’être pas revus… Elle n’est pas coupable de ne pas avoir connu Dieu… Comment est-ce elle, et non moi, dont le berceau ne fut pas entouré du ciel ? On ne peut s’empêcher d’aimer Jules, est-il étonnant qu’elle l’ait aimé ?… Cela fait moins de peine de s’être laissés, quand l’adieu s’échange dans un regard suprême… Ayez pitié d’elle que la destinée brise, permettez-lui d’emporter un souvenir plus doux…

— Toi aussi, ma Jeanne, dit le père, courbant ses épaules sous l’amertume. Eh bien, je resterai seul avec mon chagrin… Va la voir, ta Française