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au large de l’écueil

tout près de mon cœur… Oh, comme cela, je distingue un peu, si peu vos deux visages bons et tendres, le souvenir me donne le reste… Maintenant, je les possède à jamais… Éloignez-vous, l’effort épuise l’énergie de mes yeux, il faut que j’en conserve, si je veux que la lumière leur parvienne encore demain…

— Oh ! mon enfant, cela me navre et me transperce le cœur ! s’écrie Gilbert, écrasé de peine.

— C’est trop de malheur ! sanglote Geneviève.

— Ne pleurez pas, chers parents… Vous serez auprès de moi quelquefois… Cela me suffira pour vivre… Avec de la tendresse autour de soi, on n’est pas incapable de vivre… Il n’y a que les âmes tout-à-fait seules qui aient besoin de mourir… Je vous promets d’être vaillante, de ne pas me plaindre… Mais oui, ce sera encore du bonheur, vous aimer comme j’en aurai le loisir… Ah ! que je vous aimerai !… Vous serez ma vie toute entière, je ne me lasserai pas de vivre pour vous…

— Oh ! que tu es généreuse, ma fille !… Tu n’as pas une parole de haine contre cet infâme !… Je ne lui pardonnerai jamais, moi, je le sens !… Ne me le demande pas, je suis incapable