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au large de l’écueil

de l’atmosphère. Leur conversation est moins souple. On abandonne les sièges autour d’eux. Là-bas, sur les bancs espacés devant le grillage de la balustrade, on ferme les ombrelles aux couleurs tendres ou aveuglantes. Les hommes du service, en petits groupes, s’inquiètent et craignent l’effet de l’orage moins loin sur le gain du soir. On apporte la vaisselle fine et le thé bienfaisant : Marguerite verse la liqueur brune où passent des reflets d’ambre et d’or.

— Les rayons reculent devant l’ombre, dit le jeune homme. Avant longtemps, la tourmente fondra sur nous…

— Je me sens comme oppressée… À la veille des orages, il doit y avoir du poison dans l’air…

— C’est plutôt la terreur que nous inspire la venue des forces brutales de la nature ! répond Jules.

— Ce couple, auprès de nous, ne paraît guère s’en soucier, dit la jeune fille, à demi-voix.

— Quelle séduisante coquette ! reprend son ami, sur le même ton. Elle minaude pour ce garçon dont elle se moque, assurément… Savez-vous à quoi me fait songer le cœur des coquettes ?… L’amour qu’elles donnent fond comme