Page:Bernier - Ce que disait la flamme, 1913.djvu/143

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que les misères à deux furent suaves, qu’ils sont devenus nécessaires l’un à l’autre ! Par le besoin de perpétuer leur vie si tendrement une, par l’horreur de s’en imaginer la rupture, Germaine revient à l’ombre blême de la mort…

Sous l’ombre dissolvante, tout à coup, l’ensorcellement fond comme neige dans la boue. Germaine n’a-t-elle pas, en effet, la vision d’une mort hideuse où s’enliserait son bonheur ? Elle est chrétienne, mais la sensation qui la navre en est une qui l’empêche, un moment, d’être chrétienne. C’est la révolte de l’épouse, tendue, sauvage. Tous les nerfs s’irritent. D’un élan irrépressible, elle se précipite vers le lit, se frappe rudement les genoux au parquet de bois brut, saisit avidement la main qui retombe alanguie comme un arbuste déraciné. Des paroles haletantes débordent…

— François, mon bon François ! dit-elle ardemment. Reprends ta connaissance, reviens à moi !… Comme ta main est gelée ! J’ai peur : tu n’es pas mort, dis ? ouvre les yeux, réponds-moi ! J’en ai besoin, je ne peux plus supporter cela, moi !… Je t’aime si fort ! Tu n’as pas le droit de partir comme ça… Entends-tu ? reviens à moi !… Mon bon vieux François, n’ai-je pas été bonne pour toi ? Tu sais bien que je ne vivrai pas sans toi. Parle-moi, dis que tu es