Page:Bernier - Ce que disait la flamme, 1913.djvu/192

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
181
CE QUE DISAIT LA FLAMME…

gard fouilleur de Jean, immobile entre les jolies moulures cuivrées de la porte. Il ne s’explique pas la rougeur qui, spontanément, le brûle au visage. Son fils a-t-il percé les voiles de l’âme et vu remuer tout ce bonheur d’assommer les adversaires à loisir ? Et quand cela aurait eu lieu, ne doit-il pas en exulter lui-même ? Gaspard ne peut s’accuser de manœuvres déloyales : les armes légitimes seules de la concurrence le passionnent. Sa fortune est blanche comme un lys. Avoir la fierté d’une force pure, c’est un droit ! Pourquoi devant les yeux de Jean rougit-il encore, avec le besoin d’atténuer sur son visage les choses qu’il y sent lumineuses ? Au lieu de la première parole qu’il veut faire jaillir, un son rauque s’étrangle. Mécontent de lui-même, il se dompte.

— Bonsoir, Jean ! Ça va bien ? dit-il aussitôt, mais gêné.

— Et toi, mon père ?

— Tu vois !

— Si je vois ? Tes yeux sont deux incendies !

— Pas de grands mots, s’il vous plaît ! Tu sais que nous ne nous accordons pas, les grands mots et moi.

— Millionnaire, ce n’est pas un grand mot, mon père ?

— Ce n’est pas un mot, ça, mon petit Jean !

— Eh bien ?