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CE QUE DISAIT LA FLAMME…

yeux chauds de passion, à faiblir sous la voix impérieuse et martelée, devant le corps entier se ramassant pour la bataille, devant les traits raidis sous la pensée inflexible. Oui, il l’admirait de vouloir intensément, de triompher comme il le voulait, de vouloir malgré tout, indomptable, un Cyrano dans la chevalerie de la finance. Tant d’obstacles assujettis, de rivaux dans leur tombe ou vivotant inoffensifs, les débuts impitoyables franchis du courage plein l’âme, héroïquement, si l’héroïsme de nos jours n’était pas une chose à peu près rayée de l’opinion qui rapetisse et morcelle, les risques tentés avec gaillardise et dociles à l’audace, la fortune creusant sous lui une vague toujours plus haute, les sourires esclaves ou forcés autour de son front nimbé d’or, tout cela ne l’armait-il pas de pied en cap, Gaspard Fontaine le millionnaire, en une sorte de chevalier ? Et si les infériorités d’un caractère absolu blessaient Jean, une grandeur mystérieuse domine son père et le transporte lui-même, l’attendrit.

Le « moi » fantasque est déjà pardonné, la réaction a lieu par le magnétisme habituel. Une tendresse bizarre, humble en quelque sorte, gonfle le cœur de Jean. Gaspard n’a-t-il pas le visage comme transfiguré de force ? Et l’arrogance ne sied-elle pas au crâne despotique, au menton solide, à