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CE QUE DISAIT LA FLAMME...

femme parurent s’abolir. Elle fut joyeuse à l’extrême de les avoir méconnues. Lucien était merveilleux, gentilhomme, épris, souverain : elle se rappela tout ce qu’elle en avait proclamé à Jean dénonciateur, de quel mépris superficiel et injuste l’avait persécuté son frère. Au souvenir des doutes qu’elle n’avait pas bannis sur-le-champ, des hésitations qu’elle avait encouragées, elle éprouva un redoublement d’affection pour la victime. Oh ! comme elle l’aimait ! Dans la mesure où elle avait persévéré à défendre son amour, où elle avait ressenti un désir immense de sacrifice et de bonté… Ce serait donc le grand bonheur calme attendu, elle en était positive comme de la paix et de la pure lumière de la Baie des Chaleurs, aux jours de brise fortifiante… Un matin que, revenant à Québec à bord du « Cascapédiac », ils remontaient le Saint-Laurent — quatre semaines avaient fui avec empressement depuis leur mariage —, Yvonne s’aperçut qu’une buée d’ennui ternissait le visage du beau Lucien. Elle souffrit d’un malaise incompréhensible. Lucien répéta deux fois qu’aucune indisposition ne le fatiguait. « Mais tu as quelque chose ? » insista la jeune femme, « c’est la première fois que tu as ce minois depuis que… depuis que… » « Nous sommes de nouveaux mariés ! c’est peu compliqué, il me semble ! » acheva-t-il, fort agacé. Elle