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Page:Bernier - Ce que disait la flamme, 1913.djvu/388

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CE QUE DISAIT LA FLAMME…

l’amertume qui surabonde en l’âme. La querelle où Lucien l’a poussée, est solennelle, décisive. Yvonne est assez maîtresse d’elle-même pour savoir qu’en ce moment les attitudes futures des époux l’un vis-à-vis de l’autre se déterminent. Une oppression vive la mord au cœur, fait bondir sa poitrine. Si elle défaillit, si elle a le dessous, elle deviendra impuissante contre Lucien, à tel point, qu’elle n’aura plus le courage de défendre son idéal : alors qu’elle y est si attachée encore, malgré tout, à la mission de noblesse et d’amour. Avant que le chagrin ne l’en désenchante, c’est l’heure d’y convier son mari, d’être touchante, d’être énergique, d’être victorieuse. Elle devient belle d’enthousiasme et de tendresse. Après tant de railleries et de violences, comment vit-il encore, cet amour suprême qui pardonne, s’humilie et espère ?

Lucien, pendant les quelques minutes de cette méditation poignante, n’a pas osé continuer ses boutades, ses ricanements. Quelque chose de mystérieux et de fort, un moment, le paralysait… La voix de la jeune femme est palpitante de conviction et de ferveur quand elle délivre enfin du silence.

— Oui, mon cher Lucien, il faut que tu sois généreux, que tu m’écoutes de ton âme entière ! Si tu refuses, j’en aurai du chagrin énorme pour