Page:Berrichon - Jean-Arthur Rimbaud, 1912.djvu/125

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
126
JEAN-ARTHUR RIMBAUD

ce semble, rencontre en cet instant-là des consolations sérieuses, et soit digne.


1

Cette fois, c’est la Femme que j’ai vue dans la Ville, et à qui j’ai parlé et qui me parle.

J’étais dans une chambre, sans lumière. On vint me dire qu’elle était chez moi : et je la vis dans mon lit, toute à moi, sans lumière ! Je fus très ému, et beaucoup parce que c’était la maison de famille : aussi une détresse me prit J’étais en haillons, moi, et elle, mondaine qui se donnait : il lui fallait s’en aller ! Une détresse sans nom je la pris, et la laissai tomber hors du lit, presque nue ; et, dans ma faiblesse indicible, je tombai sur elle et me traînai avec elle parmi les tapis, sans lumière ! La lampe de la famille rougissait l’une après l’autre les chambres voisines. Alors, la femme disparut. Je versai plus de larmes que Dieu n’en a jamais pu demander.

Je sortis dans la ville sans fin. Ô Fatigue ! noyé dans la nuit sourde et dans la fuite du bonheur. C’était comme une nuit d’hiver, avec une neige pour étouffer le monde décidément. Les amis, auxquels je criais : où reste-t-elle, me répondaient faussement. Je fus devant les vitrages de là où elle va tous les soirs : je courais dans un jardin enseveli. On m’a repoussé. Je pleurais énormément, à tout cela. Enfin, je suis descendu dans un lieu plein de poussière, et, assis sur des charpentes, je laissai finir toutes les