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JEAN-ARTHUR RIMBAUD

Une porte s’ouvrait sur le soir à la lampe,
On le voyait là-haut qui râlait sur la rampe,
Sous un golfe de jour pendant du toit. L’été
Surtout, vaincu, stupide, il était entêté
À se renfermer dans la fraîcheur des latrines :
Il pensait là, tranquille et livrant ses narines.

Quand, lavé des odeurs du jour, le jardinet
Derrière la maison, en hiver, s’illunait :
Gisant au pied d’un mur, enterré dans la marne
Et pour des visions écrasant son œil darne,
Il écoutait grouiller les galeux espaliers.

Pitié ! ces enfants seuls étaient ses familiers
Qui, chétifs, fronts nus, œil déteignant sur la joue,
Cachant de maigres doigts jaunes et noirs de boue
Sous des habits puant la foire, et tout vieillots,
Conversaient avec la douceur des idiots.
Et si, l’ayant surpris à des pitiés immondes,
Sa mère s’effrayait, les tendresses profondes
De l’enfant se jetaient sur cet étonnement
C’était bon. Elle avait le bleu regard — qui ment !

À sept ans, il faisait des romans sur la vie
Du grand désert où luit la Liberté ravie,
Forêts, soleils, rives, savanes ! Il s’aidait
De journaux illustrés où, rouge, il regardait
Des Espagnoles rire et des Italiennes.

Quand venait, l’ûeil brun, folle, en robes d’indiennes,
— Huit ans — la fille des ouvriers d’à côté,
La petite brutale, et qu’elle avait sauté,
Dans un coin, sur son dos, en secouant ses tresses,