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JEAN-ARTHUR RIMBAUD


Leur livre de maroquin rouge ! Hélas ! Lui, comme
Mille anges blancs qui se séparent sur la route,
S’éloigne par delà la montagne Elle, toute
Froide, et noire, court ! après le départ de l’homme !

IV



Regrets des bras épais et jeunes d’herbe pure !
Or des lunes d’avril au cœur du saint lit ! Joie
Des chantiers riverains à l’abandon, en proie
Au soirs d’août qui faisaient germer ces pourritures !

Qu’Elle pleure à présent sous les remparts l’haleine
Des peupliers d’en haut est pour la seule brise.
Puis, c’est la nappe, sans renets, sans source, grise :
Un vieux, dragueur, dans sa barque immobile, peine.

V



Jouet de cet œil d’eau morne, Je n’y puis prendre,
Ô canot immobile ! oh ! bras trop courts ni l’une
Ni l’autre fleur : ni la jaune qui m’importune,
Là ; ni la bleue, amis, à l’eau couleur de cendre.

Ah ! la poudre des saules qu’une aile secoue !
Les roses des roseaux dès longtemps dévorées !
Mon canot, toujours fixe et sa chaîne tirée
Au fond de cet œil d’eau sans bords, — à quelle boue ?

Mémoire : Vision réflexe ou Miroir de Souvenirs.

(C’est, la Meuse, par un après-midi d’été, dans