Page:Bertaut - Les Œuvres poétiques, éd. Chenevière, 1891.djvu/126

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Les gardes dont ses flancs seront ceints nuit et jour :
Lisant és accidents dont la vie est feconde
Que des moindres sujets aux plus grands rois du monde
Redoutable est la crainte où ne vit point l’amour.
Qu’il ayme, qu’il adore, et craigne tout-ensemble
Celuy sous qui la terre et le ciel mesme tremble,
Et sans qui nul estat ne sçauroit se fonder.
Qu’il sçache que c’est luy qui maintient les monarques,
Et qui montre aux plus grands en mille insignes marques
Qu’un roy qui le sert mal ne peut bien commander.
Bref, que pour estre en fin comparable aux celestes,
Il croye à tes conseils, et se mire en tes gestes,
Sans monstrer ses beaux faits d’aucun vice enlaidis :
Qu’il te revere et serve, et qu’il serve et revere
Celle qu’il vient de rendre autant heureuse mere,
Que bien-heureuse femme un jour tu la rendis.
Car, certes, bien doit-elle heureuse estre nommee,
Et de toy, de ta France, et de ton peuple aimee,
Elle qui rend ainsi ton estat bien-heureux :
Et qui te donne plus en ce qu’elle nous donne,
Que si t’enrichissant d’une neuve couronne,
Elle triploit ton sceptre en ton poing valeureux.
Puisse-elle avecques toy sans cesse bien-heureuse
Repaistre en doux repos son ame genereuse
Du nectar des plaisirs dont contant tu te pais :
Digne d’estre appellee une Junon en terre,
N’estoit que de Junon vint le dieu de la guerre,
Et qu’elle nous enfante une eternelle paix.
Puisse-elle avecques toy long temps regir le monde,
Eusse-tu pour ta part de la machine ronde
Ce que les premiers ans diviserent en trois ;
Puis qu’estant le miroir des plus parfaites ames,
Sa prudente beauté luy donne entre les dames
Le nom que ta valeur t’acquiert entre les roys.
Et toy repose en paix dessus un lict de palmes,
Roy de qui les labeurs rendans nos troubles calmes