Page:Bertaut - Les Œuvres poétiques, éd. Chenevière, 1891.djvu/203

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Lors à toy revenant, et croyant que la peine
De t’oser imiter ne seroit pas si vaine,
Je te prins pour patron, mais je peu moins encor
Avec mes vers de cuivre égaler les tiens d’or :
Si bien que pour jamais ma simple outrecuidance
En gardant son desir, perdit son esperance.
Alors vos escrits seuls me chargerent les mains :
Seuls je vous estimay l’ornement des humains :
À toute heure, en tous lieux, je senty vostre image
Devant mes yeux errante exciter mon courage :
Je reveray vos noms, reveray vos hostels
Comme les temples saincts voüez aux immortels,
Voyant la palme grecque en vos mains reverdie :
Bref je vous adoray (s’il faut qu’insi je die)
Tant de vostre eloquence enchanté je devins,
Comme des dieux humains ou des hommes divins.
Il est vray que l’éclair de la vive lumiere
Qu’espandoit vostre gloire en ma foible paupiere,
M’ébloüissant la veuë au lieu de m’éclairer,
M’eust fait de vostre suite à la fin retirer,
Rebuté pour jamais des rives de Permesse :
Si de mon jeune espoir confirmant la promesse,
Vous n’eussiez mon courage à poursuivre incité,
Me redonnant le cœur que vous m’aviez osté.
Toy principalement, belle et genereuse ame
Dont le juste regret tout le cœur nous entame,
Qui voyant mon destin me voüer aux neuf sœurs,
Me promis quelque fruit de mes premieres fleurs :
M’excitas de monter apres toy sur Parnasse,
Et m’en donnas l’exemple aussi bien que l’audace :
Me disant que Clion m’apperceut d’un bon oeil,
Lors que mon premier jour veit les rais du soleil :