Page:Bertaut - Les Œuvres poétiques, éd. Chenevière, 1891.djvu/254

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Parmy toute la terre espandu leur renom,
L’ornement d’Italie est son juste surnom.
C’est de ces chaines-là dont les astres ordonnent
Que les nœuds de Junon de nouveau t’emprisonnent,
Pour voir naistre de toy de grands et puissans rois
Au sceptre et de la France et des monts navarrois,
Voire à toute l’Europe, et presqu’à tout l’empire
Qui sous le joug turquesque incessamment souspire :
Car celuy qui du monde embrasse le grand tour
Ne promet rien de moindre aux fruits d’un tel amour.
Il s’éleve une sale au palais de la Parque,
Où des dieux et des rois le pere et le monarque
Reserre les destins des grands de l’univers
Profondement gravez en des tableaux divers,
Les uns d’or et d’argent, et les autres de cuivre,
Et les autres de fer, selon que les doit suivre
Un sort obscur ou noble, et qu’ils sont destinez
De vivre en leurs desseins bien ou mal fortunez.
Là, dans un tableau d’or où la main de memoire
D’un burin eternel a gravé ton histoire,
Je leu n’a pas long temps, alors que le trespas
En ce palais fatal guida mes tristes pas,
Que le doux fleuve d’Arne, et les champs qu’il
Arrouse
Te devoient quelque jour envoyer pour espouse
Une belle princesse en qui l’heur des destins
Assembloit les vertus des grands ducs florentins :
Et que les fruits naissans de deux si rares plantes
Estans l’unique mort des discordes sanglantes
Qui déchirent la France, y feroient refleurir
Tous les biens que la guerre a contraints d’y mourir :
Puis recevans du ciel, apres quelque tempeste,
L’Europe en heritage, et l’Asie en conqueste.
Occuperoient un jour de leur seule grandeur
Tout ce que de ce monde occupe la rondeur,
Et feroient que la terre à leurs loix obligee
Se verroit à la fin entre eux seuls partagee.
Là, je leu qu’il estoit de long temps arresté,
Que pour n’empescher point un heur tant souhaitté