Page:Bertaut - Les Œuvres poétiques, éd. Chenevière, 1891.djvu/257

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Ne peut plus les baiser si ce n’est par ta bouche :
Seul et dernier regret dont l’attainte me touche,
Apres l’extréme ennuy qui me fait lamenter
Sentant la fiere mort pour jamais m’absenter
De toy, que sans espoir de plus revoir ta face
Pour la derniere fois avec larmes j’embrasse.
Adieu mon doux regret, le clair astre du jour
S’approchant me contraint de quitter ce sejour.
Ainsi parla l’idole, et puis comme un nuage,
Se perdit dedans l’air au milieu de l’ombrage.

TRESPAS SŒUR UNIQUE DU ROY

Donc, ô grande princesse, apres la vaine attente
D’un heur qui devoit rendre et la France contente,
Et de ton cher espoux les souhaits accomplis,
Et tous les champs lorrains d’allegresse remplis :
Au lieu d’avoir conceu l’espoir de l’Austrasie,
Et dissipé l’ennuy dont elle estoit saisie
Pour le mal qui sur toy redoubloit son effort,
Tu n’as finalement rien conceu que ta mort ?
Donc le ciel rendu sourd à la voix de nos plaintes,
N’a point eu de nos cris les oreilles attaintes ?
Ny tant de justes vœux conceus pour ta santé
N’ont sceu par nos souspirs fléchir la cruauté
Du destin qui vouloit qu’à sa mortelle envie
La rigueur du trespas sacrifiast ta vie ?
Las ! Si n’estoit-ce pas un funeste cercueil,
Ny des regrets sans fin, ny des habits de dueil,