Page:Bertaut - Les Œuvres poétiques, éd. Chenevière, 1891.djvu/335

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Qu’ailleurs, au prix de là, cessent tous traits de guerre,
Et nul par la cité n’ensanglante la terre :
Veu l’ardeur du combat, veu le boüillant effort
Dont la rage des grecs lutte contre le fort,
Armant de cent boucliers la guerriere tortuë,
Pres du sueil de la porte assiegee et battuë.
Mainte eschelle dressee en acroche les murs,
Par où grimpants à force entre les flancs obscurs
Et dessous les posteaux que les teucres deffendent,
Avec la gauche main qu’en avant ils estendent,
Ils opposent aux traits leurs pavois surhaussez,
Et s’attachent de l’autre aux creneaux embrassez.
Les troyens de leur part arrachent les sablieres,
Les combles des maisons, les tours toutes entieres :
Avec ces armes-là vengeans plustost leur mort,
Que deffendans leur vie encontre un tel effort :
Tant qu’on voit à la fin leurs mains desesperees
Rouler les bois sacrez, et les poutres dorees
Qui, comme monuments restans de nos ayeux,
Ornoient le sainct orgueil des plus augustes lieux.
Les autres deffendans les basses advenuës
Avec un escadron tout flambant d’armes nuës,
Ressemblent à des murs entierement ferrez,
Tant leurs rangs se suivans sont unis et serrez.
Là, nous reprenons tous une fureur égalle,
Ardans de secourir la demeure royalle,
Aider à ces guerriers, et leur renfler le cœur,
D’un boüillonnant esprit d’audace et de vigueur.
Il s’ouvroit dans les murs plus fuyans en arriere
Une porte secrette et venuë de lumiere,
Qui servoit de passage aux superbes cloisons
Dont Priam distinguoit ses augustes maisons,
Par où, devant qu’encor Troye eust esté destruite,
Bien souvent Andromache et non veüe, et sans suite,
Alloit voir son beau-pere, ou seule avec un seul,
Portoit Astyanax vers le roy son ayeul.
Coulé dedans par là, je monte au plus haut feste,
D’où les pauvres troyens espandoient sur la teste