Page:Bertaut - Les Œuvres poétiques, éd. Chenevière, 1891.djvu/81

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Ou m’absous par ta grace, ou permets que j’appelle
De toy plein de vengeance à toy plein de pitié.

Mais que dy-je impudent ? Auroy-je bien l’audace
D’en appeller à toy, sans redouter la face
De qui j’ay tant de fois le respect violé ?
Le sacrilege atteint, et voisin de sa prise,
N’auroit-il point d’horreur de prendre pour franchise
Les cornes de l’autel que sa main a volé ?

Ô Seigneur, tes bontez ceste audace m’inspirent,
Promettant aux pecheurs qui vers toy se retirent,
Non seulement pitié, mais faveur et guerdon :
Et bien doit-on attendre un arrest favorable,
Quand le juge se monstre advocat du coulpable,
Et l’object de l’offense est l’autheur du pardon.

Toy donc, que seul j’invoque en l’ennuy qui m’outrage
Seigneur ne vueilles point dedaigner ton ouvrage,
Ains ton oeil de pitié sur mes maux retourner :
Fay croistre en moy les fruits dont tu veux des offrandes :
Opere en moy le bien que de moy tu demandes,
Puis juste vien en moy tes œuvres couronner.

Seul salut de mon ame et son remede unique,
Touche de ce pecheur l’esprit paralytique,
Qui gist sans mouvement sur la terre estendu :
Fay, Seigneur, que ta grace en soit la medecine,
Noyant sa maladie en la saincte Piscine
Du sang que ton amour a pour nous épandu.

Grand Soleil de justice, inaccessible flame,
Verse avec tes rayons ta lumiere en mon ame,