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— Ma chère, il est bien tard. Il serait temps de nous coucher.

— Pas encore, répondit Ursule en minaudant. Restons ici encore quelques minutes, le ciel est si beau.

Tout à coup le silence de la nuit fut troublé par le son prolongé d’une trompette.

Bénoni tressaillit comme s’il avait été mordu par un serpent. Il lâcha Ursule et se porta les mains à la figure.

La jeune femme inquiète dit :

— Mais, Bénoni, tu me fais peur, qu’as-tu donc ce soir ?

La trompette retentit une deuxième fois.

Bénoni pâlit, chancela et tomba anéanti sur une chaise.

— Qu’as-tu, mon trognon ? reprit Ursule. Est-ce cette trompette qui t’effraie ?

— Oui, cette trompette ! dit Bénoni d’une voix haletante, cette trompette maudite.

— Mais, cher ami, tu devrais savoir que c’est la trompette du « stage » de St-Eustache.


Le « stage » de St-Eustache.

— Non, non, fit Bénoni d’une voix que la terreur rendait sifflante. Ce n’est pas la trompette du « stage ». Le maudit, il veut m’arracher à mon bonheur. Ursule, je suis perdu. Écoute ! il est là. Il m’attend pour me détruire.

La trompette recommença sa lugubre fanfare.

Un nuage passa devant les yeux de Bénoni.

Il se leva d’un bond de sa chaise et saisit un couteau sur la table en s’écriant :

— Caraquette, l’un de nous doit mourir ce soir.

Un coup violent fut donné dans la porte par quelqu’un qui était sur la galerie.

— Mon Dieu ! que veut dire tout ceci ? dit Ursule. Qui frappe à notre porte à cette heure ?

— C’est mon mauvais génie. Il faut que j’ouvre.

— Mais, tu n’es pas fou le casque, ouvrir notre porte à minuit, Bénoni, je crois que tu deviens fou.