Page:Berthelot - Les mystères de Montréal, 1898.djvu/92

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
91

transporter la malle chez le vieux charretier et de l’y laisser jusqu’à ce qu’il trouvât un endroit convenable pour le cacher.

Cléophas se leva et alla chercher un charretier sur la stand du carré Jacques-Cartier.

Il mit la malle dans la voiture et se fit conduire sur la rue Lagauchetière.

Pendant le trajet l’orage éclata et la pluie tomba par torrents.

Le tonnerre grondait avec un bruit lugubre et la foudre déchirait le sein de la nue.

Le ciel semblait protester contre le crime que Cléophas était en voie d’accomplir.

La voiture s’arrêta devant la résidence du père Sansfaçon.

Cléophas descendit, monta l’escalier de la galerie et alla frapper à la porte vitrée.

La mère Sansfaçon se leva et alla ouvrir.

Cléophas expliqua en peu de mots à la bonne femme l’objet de sa visite nocturne.

Madame Sansfaçon alluma une lampe et dit à Cléophas de déposer sa malle dans la salle à dîner.

— Écoutez, la mère, dit Cléophas en se mettant à l’aise dans une chaise berçante et allumant un partagas, votre fortune, la mienne et celle de votre mari dépendent du secret que vous allez garder sur ce que je vais vous dire. Dans la valise que vous voyez est un trésor qui appartient au petit Pite, qui aujourd’hui doit s’appeler le comte de Bouctouche. Un mauvais génie a poursuivi constamment la famille noble des Bouctouche. Ce mauvais génie, c’est monsieur Caraquette, qui deviendrait l’héritier du comte dans le cas où il mourrait sans enfants.

Le comte est mort dans une auberge de Ste-Thérèse, et avant de mourir il m’a légué ses papiers. Il m’a dit de veiller sur sa veuve et de la protéger contre Caraquette qui voudrait la dépouiller de sa fortune. L’unique enfant né du mariage du comte était un enfant qui est mort à St-Jérôme. Le petit défunt avait sur le corps l’image du castor. Aujourd’hui la même image est gravée sur la peau du petit Pite. De sorte qu’il devra passer pour l’héritier de Bouctouche. Caraquette a essayé de me tuer à St-Jérôme, parce qu’il sait que je suis en possession des papiers du comte. J’ai été accusé de meurtre par l’assassin lui-même.

La justice me poursuit mais elle ne me rattrapera pas avant que mon innocence éclate devant tout le monde. À l’heure où je vous parle les détectives doivent être à mes trousses. Je me tiendrai caché chez vous jusqu’au moment où il faudra frapper à grand