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le colosse de rhodes

temple d’Héraclès, avaient été aussi désignés pour le sacrifice. Quand tout fut prêt, un des Héliades fit un signe, et le vieillard, montant dans le char et rassemblant les rênes dans sa main, conduisit l’attelage vers la mer…

Ce fut long ; il semblait que les vagues, étonnées d’un tel fardeau, ne voulussent point le porter. De leurs crêtes, hérissées comme des épées, elles le renvoyaient au rivage. Mais, patient et sûr, le vieillard poussait ses coursiers dans l’abîme. Eux se cabraient, frémissant de sentir sur leurs jarrets le froid inconnu de cette eau. La mort, ils la humaient de leurs naseaux fumants, ils la devinaient toute proche ; l’écume de leurs bouches se mêlait à celle des vagues. Ils hennissaient, tandis que leurs crinières flottaient encore et que de leurs têtes haletantes ils cherchaient à refouler ce mur liquide dressé devant eux. Bientôt le char s’inclina ; on ne vit plus que la chevelure blanche du vieillard qui semblait une petite fumée sur la mer. Puis plus rien qu’un léger oscillement, recouvrant les derniers spasmes de ces vies jetées en pâ-