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le colosse de rhodes

Stasippe s’en aperçut ; il s’écarta pour ne pas la gêner dans ce tête-à-tête plein de mystère ; et d’un coup d’œil oblique il l’examinait de loin. Certainement cette femme devait être amoureuse. Tout son être exhalait une passion contenue et ardente. Elle parlait avec chaleur, elle avait des gestes nets et vibrants. Lorsqu’il se rapprocha d’elle, la nudité du satyre débordait ses prunelles fauves. Elle dit avec simplicité :

— Je viens de passer un des moments les plus exquis de mon existence. Ce tableau de Protogène mérite en effet tout le bien que l’on en dit, et je ne m’étonne plus que Démétrius, lorsqu’il fit le siège de Rhodes, ait préféré épargner toute la ville que de détruire un tel chef-d’œuvre.

— Tu te trompes, Adonaïa ; il ne s’agit pas de ce tableau, mais du portrait de Ialysos, fils d’Héraclès, peint également par Protogène, et qui se trouvait dans la forteresse d’Ochyrème. L’artiste attachait un tel prix à cette œuvre qu’il l’avait revêtue de quatre couches de peintures successives, afin que, si le temps venait à user la première, les autres pussent reparaître