Page:Bertheroy - Le Colosse de Rhodes.pdf/328

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
318
le colosse de rhodes

rien : sa rivale dormait au creux d’un étroit tombeau. Et le sort l’avait si bien servie, l’orgueilleuse Juive tyrienne, qu’elle n’avait même pas eu besoin de perpétrer elle-même sa vengeance. Likès n’aurait pas à lui reprocher la mort de celle qu’il avait aimée autrefois…

De la haute fenêtre d’où elle avait vu se dérouler les funérailles d’Isanor, Namourah interrogeait la ville. Elle attendait. Sa vie était liée étroitement à cette vie prodigieuse et innombrable qui respirait là, entre les triples remparts. Étrangère, elle était pourtant la première de toutes les femmes de Rhodes, la plus enviée, la plus respectée, la plus admirée. La force de sa volonté égalait la force du Colosse. Elle et lui, tous deux venus du rivage chanéen, avaient implanté leur domination dans l’île des roses à l’ineffable douceur. Maintenant un grand courant d’ambition jetait tout ce peuple aux œuvres viriles et actives, et Likès, le dernier peut-être de tous ceux en qui persistait un peu de cette douceur de la terre maternelle, allait devenir le chef du formidable Arsenal où