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les vierges de syracuse

maintenant il n’était pas un Syracusain pouvant disposer de quelques mines qui ne voulût posséder au seuil de sa maison une de ces jeunes et délicates Victoires, debout sur leur socle de porphyre, les bras soulevés et la tête resplendissante, qui semblaient raconter au passant étranger la gloire invincible de Syracuse et l’héroïsme prodigieux de ses enfants.

Le vieux roi, aux discours cauteleux d’Orthon, branlait la tête.

— Oui, je sais, disait-il ; vous avez toujours été pour moi un bon serviteur et je me plais à reconnaître vos mérites. Mais je voudrais cette fois vous mettre à une épreuve plus difficile. Je rêve d’avoir avant de mourir une couronne aussi lourde que mon front pourra la porter. Ce sera — ajouta-t-il avec un large sourire qui s’épanouit dans sa face blanche, — un emblème des soucis de la tyrannie dont nul n’accepterait de se charger, s’il pouvait en supposer le poids.

— Hélas ! répondit insidieusement Orthon, qui voudrait naître s’il connaissait les tourments de la vie ; mais une fois né, qui veut mourir ?

— En effet, dit le roi ; et il est surprenant que nous nous attachions à ce qui mérite si peu notre estime.

Il s’arrêta et fixa sur Orthon la vrille de ses regards de très vieil homme qui avaient déjà pénétré tant de consciences humaines ; et de le voir chétif et