Page:Bertrand - D’Alembert, 1889.djvu/81

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leur imitation est plus agréable que les objets mêmes, parce qu’elle nous place à cette juste distance où nous éprouvons le plaisir de l’émotion sans en ressentir le désordre ; c’est dans cette imitation des objets capables d’exciter en nous des sentiments vifs ou agréables, de quelque nature qu’ils soient, que consiste, en général, l’imitation de la belle nature, sur laquelle tant d’auteurs ont écrit sans en donner d’idée nette.

Ce que nous savons de l’histoire semble s’accorder mal avec l’enchaînement exposé par d’Alembert. Il prévoit l’objection. Quand on considère depuis l’époque de la Renaissance les progrès de l’esprit humain, on trouve, dit-il, que les progrès se sont faits dans l’ordre qu’ils devaient naturellement suivre. Cet ordre est précisément le contraire de celui que propose le discours. En sortant d’un long intervalle d’ignorance que des siècles de lumière avaient précédé, la régénération des idées a dû nécessairement être différente de leur génération primitive.

Un grand poète a dit :


Le présent au hasard flotte sur le passé.


D’Alembert ne veut pas croire au hasard. La partie la plus brillante du discours préliminaire est le tableau tracé, d’après l’histoire, de la marche de l’esprit humain depuis son renouvellement par l’invention de l’imprimerie et l’émigration des savants du Bas-Empire apportant les richesses de l’anti-