Page:Bertrand - Gaspard de la nuit, éd. Asselineau, 1868.djvu/26

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Oh ! qu’il est doux de s’éveiller, au milieu de la nuit, quand la lune, qui se glisse mystérieusement jusqu’à votre couche, vous éveille avec un mélancolique baiser !

Minuit, 1" janvier 1827.

Bertrand n’a pas seulement corrigé les termes de ce morceau, il en a changé le ton. Le besoin de précision lui a fait tourner en ironie le vague du premier dessin.

Celle qui suit pourrait être de même un premier crayon de la seconde pièce du sixième livre, Jean des Tilles:

LES LAVANDIÈRES A Emile Deschamps.

Le soleil est arrivé au sommet de la voûte céleste ; les lavandières, penchées au bord de l’Armançon, ont cru voir tout à coup une auréole dorée se jouer autour de leurs blonds cheveux et couronner leurs têtes dans les eaux.

Et les jeunes filles qui étendent sur les herbes verdoyantes ou suspendent aux sureaux les blanches toiles, ont cru voir dans les prairies des rayons aériens voltiger comme des papillons de fleur en fleur.

« C’est, disent les lavandières et les jeunes filles, c’est l’ondin de l’Armançon, qui se plaît à nous dérober nos anneaux, lorsque nos bras nus sont caressés par les ondes, qui danse et chante la nuit sur l’écume de la cascade, et qui, malicieux et vain, cueille et jette les fruits mûrs au courant des eaux. »

En ce moment, un pivert a passé sous les saules balancés par le vent; ses ailes bleues ont rasé le limpide miroir de l’Armançon, et puis il s’est plongé dans la grotte