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Page:Bertrand - Gaspard de la nuit, éd. Asselineau, 1868.djvu/25

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jointes à d’autres pièces trop longues pour être intercalées ici, et qui composeront comme un Louis Bertrand supplémentaire. Je ne veux rattacher à cette introduction que les pièces s’ajustant comme documents à la biographie de Louis Bertrand ou à l’histoire de son œuvre. Telles sont les trois pièces suivantes, qui se retrouvent remaniées et notablement modifiées dans le Gaspard de la Nuit. La première est une version primitive et comme une variante à priori de la pièce Ve du livre III, intitulée aussi Clair de Lune :

LE CLAIR DE LUNE

A l’auteur de Trilby

A l’heure qui sépare un jour d’un autre jour, quand la cité dort silencieuse, je m’éveillai une nuit d’hiver en sursaut, comme si j’avais ouï prononcer mon nom auprès de moi.

Ma chambre était à demi-obscure; la lune, vêtue d’une robe vaporeuse comme une blanche fée, regardait mon sommeil et me souriait à travers les vitraux.

Une ronde nocturne passait dans la rue. Un chien sans asile hurlait dans un carrefour désert, et le grillon chantait dans mon foyer.

Bientôt les bruits s’affaiblirent par degrés. La ronde nocturne s’était éloignée, on avait ouvert une porte au pauvre chien abandonné, et le grillon, las de chanter, s’était endormi.

Et moi, à peine sorti d’un rêve, les yeux encore éblouis des merveilles d’un autre monde, tout ce qui m’entourait était un rêve pour moi.