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Page:Bertrand - Gaspard de la nuit, éd. Asselineau, 1868.djvu/271

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un autre arbalétrier ; je suis bien las, je l’avoue, de cette vie que je mène, de châteaux en couvents : advienne ici monseigneur Duguesclin, et je cours servir le roi ; la part du Diable faite, reste à faire la part du bon Dieu. »

Nouveaux éclats de rire, plus bruyants encore que les premiers ; la vedette lointaine prête l’oreille, attentive à cette gaîté sauvage qui réjouit les vallées et les bois.

— « Georges, tu parles comme un saint, et nous pensons tous comme toi, dit un troisième maraudeur ; mais si le Fauconnier apprenait ce que nous avons dit, je ne répondrais pas de te voir demain à pareille heure compter les étoiles avec nous. Écoute !… Tu connais Thomas ?

— Thomas ! répondit Georges, et qui ne connaît Thomas, l’archer le plus adroit des franches compagnies, moi ex le Fauconnier exceptés? Thomas! homme de croc, s’il en fut ! Que de filles et de marchands nous avons ensemble houspillés de nos mains! Liesse et bonne chère ! c’est notre devise à nous deux. Hier encore… vous m’entendez ?

— Hier ?

— Eh bien !

— Nous y voilà, répondit le soldat. Thomas a dérobé maladroitement hier un chapon dans les bassecours de Chagny, et Thomas a été pendu ce matin. Un écu d’or à qui dénoncera l’autre soldat !