Page:Bertrand - L'appel du sol, 1916.djvu/59

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
45
LA MORT D’UN SOLDAT

À présent, les Allemands savaient qu’il faudrait enlever le village, qu’on se cramponnait à la rivière. Ils prenaient leur temps. Couchés, en tirailleurs, ils bondissaient d’abri en abri. Aux abords du village, et surtout autour du pont, c’était une pluie de plomb.

Deux chasseurs râlaient, côte à côte : on eût dit que la même balle les avait atteints. Une angoisse avait étreint les autres. Serre lui-même se sentait ému. Le canon de son fusil était chaud. Les soldats ennemis tombaient, fauchés ainsi que les blés mûrs. Cela n’empêchait pas le front de progresser d’une marche lente et sûre. On avait l’impression d’une marée qui montait vers vous.

— Ils ne reculent pas, les cochons, déclara Serre.

Et, cette fois-ci, il était désappointé de constater le courage de ces rudes soldats.

Les chasseurs tiraient toujours. Mais Serre crut sentir de la lassitude chez eux. Il ordonna :

— Cessez-le feu !

Une accalmie suivit son commandement.

Les hommes changèrent de position, en souf-