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Page:Bertrand - L'appel du sol, 1916.djvu/58

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L’APPEL DU SOL

Le soleil montait droit dans le ciel bleu. C’était une journée de splendeur et de gloire. Le roulement de l’artillerie emplissait l’air. On sentait que la bataille était engagée sur un front immense et qu’on n’était qu’un point dans l’espace ensanglanté, qu’une minute dans le temps. Les obus français déferlaient en avant. On entendait passer les projectiles ennemis. Il y en avait de tous les calibres. Les uns éclataient avec ce bruit sec et argentin de l’acier qui se déchire. Les autres traversaient l’atmosphère avec un son aigu de sifflet. D’autres, plus gros, donnaient l’impression d’une locomotive en marche. Il y en avait dont le passage faisait le bruit d’une sirène de paquebot. Certains sonnaient, en arrivant, comme les cloches d’un troupeau.

Et voici que, par delà la rivière. Serre remarquait de nouveau l’ondulation des foins, un mouvement dans les seigles que n’effleurait aucune brise, l’avance par les champs d’une ligne grise. Le sifflement des balles immédiatement l’environna.

— Ils y reviennent, dit-il, non sans joie, en s’abritant enfin derrière un sac.