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le débutant

reçue par la tante Zoé et lui exposa la situation désespérée dans laquelle elle se trouvait.

La bonne femme en fut consternée. Elle appela Paul, qui s’était sauvé furtivement dans sa chambre, à l’arrivée de mademoiselle Jobin. Il s’avança, tout penaud, et, tout à coup, fondant en larmes, il vint se jeter dans les bras de sa tante.

Tante Zoé parvint à le calmer en le gardant sur ses genoux. Elle lui demanda :

— Pourquoi que t’aimes pas ta maîtresse asteur ? Y paraît que tu y as fait de la peine.

L’institutrice ajouta :

— Est-ce bien vrai que tu ne m’aimes plus ?

L’enfant resta muet.

La tante reprit :

— Pauvre p’tit ! les chats y’ont mangé la langue.

Paul se serra davantage sur la poitrine plate de sa mère d’adoption et demeura silencieux.

L’institutrice voulut s’approcher ; mais Paul s’écria, frémissant de tout son être :

— Ne me touchez pas ! Ne me touchez pas !

Quand mademoiselle Jobin fut partie, tante Zoé promit à son neveu un gros morceau de sucre du pays, dont il était friand, s’il voulait lui dire ce qu’il avait contre sa maîtresse. Outrée de son mutisme obstiné, elle le menaça ensuite de la colère de l’oncle Batèche, qui était terrible avec les petits. Promesses et menaces furent inutiles, Paul garda son secret.

Enfin, le grand jour de l’examen arriva.

L’école avait un air de fête ce matin-là : le perron avait été balayé avec soin et les vitres des fenêtres, lavées de la veille, brillaient au soleil. Dès huit heures, petits garçons et petites filles en habits des dimanches, débarbouillés et peignés comme pour aller à la messe, arrivèrent par le chemin poussiéreux et,

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