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le débutant
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drait à travail ; çà le renforcirait ; il avait les mains trop douces, des mains de bon à rien ; si c’était pas bougrant ! Bref, l’offre fut acceptée sans plus de manières.

L’entaillage des érables, aux premiers beaux jours de soleil, n’est pas un jeu d’enfant. Il faut marcher dans la neige jusqu’à mi-jambe, souvent jusqu’à la ceinture, pour aller d’un érable à l’autre percer le tronc de la profondeur voulue, planter la goutterelle et y accrocher l’oblong récipient de ferblanc destiné à recueillir l’eau sucrée. Cette opération, qui dura deux jours, faillit avoir raison de la bonne volonté du jeune homme, tombant de fatigue au retour à la maison, et douloureusement courbaturé le matin, à son réveil. Mais quand les chemins furent tracés et les sentiers battus, la tournée que l’on faisait matin et soir, par les jours de grande coulée, et une fois par jour en temps ordinaire, devint pour lui un salutaire et agréable exer­cice. Il portait allègrement, au bout du bras, le seau rempli d’eau d’érable qu’il allait vider dans le tonneau monté sur un sleigh en bois rond, traîné par deux chevaux. Quelquefois, l’oncle Batèche venait lui donner un coup de main, mais la plupart du temps il restait à la cabane à chauffer ses fourneaux et à surveiller la cuisson du sucre. On mangeait dans le bois, sur un tonneau renversé, de bonnes omelettes au lard, d’appétissantes trempettes, et quand il fallait veiller la nuit pour faire bouillir la surabondance d’eau accumulée, Paul Mirot, étendu sur une peau de buffle, devant le feu, reposait délicieusement.

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