Page:Bethléem - Romans à lire et romans à proscrire, 7e éd.djvu/61

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des air des vestales, et qui outragent la morale avec une phrase décente et chaste. La séduction de la phrase est plus dangereuse que le cynisme des peintures, car tandis que le lecteur séduit n’est pas loin de croire qu’il ne goûte qu’un plaisir permis, délicat et distingué, il savoure en réalité, un plaisir honteux et abominable. »

Ces écrivains pervers ne se contentent pas de peindre le péché, sous les couleurs les plus hideuses ou les plus attrayantes ; ils s’appliquent encore à le justifier et c’est ce qui met le comble au scandale. Non seulement ils fascinent les sens et gâtent le cœur, ils pervertissent aussi les idées.

Pour garantir leurs lecteurs contre le remords intime et leurs œuvres contre le mépris public, ils prêchent, en s’inspirant de Rousseau, de Kant et de Goethe, le droit de l’homme et de la femme au bonheur, ils proclament avec Voltaire (Épitre à Mme de G… 1716) que

Le plaisir est l’objet, le devoir et le but
De tous les êtres raisonnables.

Ils justifient les convoitises de la nature ; ils insinuent clairement que le mariage est un mal, le divorce un droit, l’adultère une nécessité ; ils proclament que l’amour voluptueux est une chaste ardeur, ses manifestations un entraînement pardonnable, un péché mignon ou un cas pathologique ; ils prêchent que les lois de la chasteté ne sont pas plus obligatoires que celles du mariage, que la fidélité conjugale est une absurdité et une impossibilité. Ils tournent en ridicule l’honnête femme et réhabilitent la courtisane, ils mettent sur la même ligne les enfants légitimes et les enfants de la débauche. En un mot, ils appellent bien ce qui est mal et mal ce qui est bien, ils exaltent le vice et flétrissent le devoir, ils renversent les notions les