Page:Bibaud - Histoire du Canada et des Canadiens sous la domination anglaise, Vol 2, 1844.djvu/20

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nombre des officiers envoyés d’Angleterre augmenta les inquiétudes de la colonie ; au lieu d’être des gens de mœurs et de talens, ils étaient tout le contraire. Le juge en chef choisi pour faire goûter à 76,000 étrangers les lois et le gouvernement de la Grande-Bretagne, fut tiré d’une prison, et il ignorait le droit civil et la langue des habitans. Le procureur-général n’était pas mieux qualifié du côté de la langue du pays. Les places de secrétaire de la province, de greffier du conseil, de régistrateur, de prévôt-maréchal, &c., furent données à des favoris, qui les louèrent aux plus offrants, et ils regardèrent si peu à la capacité de leurs substituts, qu’aucun d’eux n’entendait la langue des habitans du pays. Comme il n’était pas attaché de salaires fixes à ces emplois, leur valeur dépendait des honoraires, qui furent mis, d’après mes instructions, sur le pied de ceux de la plus riche des anciennes colonies. Cette forte taxe, et la rapacité des gens de loi venus d’Angleterre, furent pour les Canadiens un pesant fardeau ; mais ils le portèrent patiemment ; » c’est-à-dire, sans doute, en ne témoignant leur mécontentement que par des murmures étouffés, ou par des plaintes réciproques, dans les conversations qu’ils avaient entre eux. La fin de la domination française avait, en quelque sorte, préparé les Canadiens au commencement de celle de l’Angleterre ; mais, si la gravité de l’histoire le permettait, on pourrait dire qu’ils étaient tombés de Carybde en Scylla.

Des délégués de toutes les paroisses de la province se réunirent à Québec, dans l’été de 1764 ; mais comme les sermens qu’on exigeait d’eux répugnaient à leur religion, ils se séparèrent sans avoir rien fait.

Un fait qui semblerait être d’une nature privée, mais qui est devenu historique par les discussions légales auxquelles il donna lieu, et par la correspondance qui s’en