Page:Bibaud - Histoire du Canada et des Canadiens sous la domination anglaise, Vol 2, 1844.djvu/356

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bien plus capable de nuire que de profiter à sa cause, en lui donnant l’air et l’apparence d’une opposition irraisonnable et factieuse.

La cause du parti libéral, ou de la réforme, venait d’être empirée, du moins aux yeux des philosophes, ou des politiques modérés, par l’inconvenance politique qu’il commit, en s’adjoignant encore les radicaux, pour intervenir dans une affaire dont la politique ne devait pas se mêler, du moins pour devenir politique de parti.

Un nouveau juge était arrivé depuis peu d’Angleterre. Vertueux, consciencieux jusqu’au scrupule ; esclave de la lettre de la loi, et oublieux des convenances, ou des formes politiques et officielles, M. John Walpole Willis fut étourdi, en apparence, par l’état de la société où il venait d’être jetté, ou n’était pas fait pour elle. Déjà, en pleine cour, il avait eu l’imprudence de réprimander sévèrement, d’accuser gravement et de menacer d’une accusation ultérieure devant le roi, M. Robinson, procureur-général, homme de talens éminents, et d’une grande influence dans la province. Tous les journaux favorables à l’administration avaient réprouvé hautement le procédé du juge Willis à l’égard de M. Robinson, comme tout-à-fait insolite ou inconvenant, et ceux qui lui voulaient du bien ne pouvaient guère s’empêcher de le regretter en eux-mêmes.

À cette première imprudence, il en ajouta, un peu plus tard, une seconde, qui devait être nécessairement suivie pour lui de conséquences plus graves, ou plus immédiates.

Après avoir siégé plusieurs fois, et à différents intervalles, à la cour supérieure, avec d’autres juges, M. Willis se mit tout-à coup dans l’esprit, que cette cour se tenait et avait été tenue illégalement ; et il le déclara, non de son cabinet, par lettre au lieutenant-gouverneur,