Page:Bibaud - Lionel Duvernoy, 1912.djvu/80

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Les marmots se roulent, s’amusent et se querellent. On entend sur le poêle, reluisant comme la face d’un Africain, le glou-glou du potage, répandant un arôme appétissant. Sur la table, la nappe est bien propre, quatre couverts y sont placés, un morceau de beurre, un morceau de fromage, une large terrine de grès remplie de lait, un pain. On n’attend plus que le maître du logis.

Sur le buffet un vieux St-Antoine, le bras cassé ne soutient plus que par un vrai miracle, l’enfant Dieu ; à ses pieds un petit cheval de bois traîne une charrette qui, elle aussi est allée à la guerre, plus que trois roues à son actif ; à l’autre bout sous un globe de verre, deux mains de cire se réunissent dans une chaude étreinte, sur un plateau de velours rouge ; puis, plus loin, comme garniture, un pot de cristal, sans anse, deux tasses fêlées, un chien de faïence, un mouton que conduit son berger ; le tout rangé en bataille avec un sublime mépris du goût artistique. Pendus à la muraille, se voit des poêles, différents ustensiles de cuisine. Des chaises boiteuses, un sofa lit servant d’armoire, constituent l’ameublement de la pièce, qui en dépit de sa pauvreté respire un certain air de confort parce qu’il y règne une scrupuleuse propreté.

Le ronron du chat, couché sur un vieux tabouret, annonce combien ce commensal de