Page:Billaud - Frissons, 1874.djvu/23

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Eh bien ! sur mon honneur, au moment du réveil,
Quand, ivre de triomphe, et d’or et de bien-être,
Je verrais s’effeuiller les roses du sommeil ;
Quand la réalité soufflerait sur mon être ;
J’oublierais sans regret Golconde et Visapour,
Avec le roi Midas les trésors du Pactole,
Ma muse résignée, au bas du Capitale,
Pleurerait sans médire une larme d’amour…
Mais comment oublier le songe où je vis Rose
M’enivrer du nectar dont seule elle dispose,
La nuit où je la vis m’aimer.


— Charmeuse de ma nuit, exauce mon délire,
Viens rêver avec moi dans la vallée en fleurs,
La campagne déserte a d’immenses splendeurs
Et les pensers brûlants s’y mêlent au zéphyre.


Crois à ma passion, veux-tu m’aimer, dis, Rose,
Veux-tu créer sur terre un autre paradis ?
Pour t’enivrer d’amour, dans les discrets taillis,
Je serai poésie en ce siècle de prose.


Quand nous aurons trouvé l’harmonieux silence
Qui règne sûrement à l’ombre des grands bois,
Nous aurons l’idéal ; c’est ainsi qu’autrefois
Soupirait Jocelyn aux côtés de Laurence.