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LE MAGNÉTISME ANIMAL

continuée, l’attouchement indispensable, la chaleur individuelle communiquée, les regards confondus, sont les voies connues de la nature, et les moyens qu’elle a préparés de tout temps pour opérer immanquablement la communication des sensations et des affections.

« L’homme qui magnétise a ordinairement les genoux de la femme renfermés dans les siens ; les genoux et toutes les parties inférieures du corps sont par conséquent en contact. La main est appliquée sur les hypocondres, et quelquefois plus bas sur les ovaires ; le tact est donc exercé à la fois sur une infinité de parties, et dans le voisinage des parties les plus sensibles du corps.

« Souvent l’homme, ayant sa main gauche ainsi appliquée, passe la droite derrière le corps de la femme : le mouvement de l’un et de l’autre est de se pencher mutuellement pour favoriser ce double attouchement. La proximité devient la plus grande possible, le visage touche presque le visage, les haleines se respirent, toutes les impressions physiques se partagent instantanément, et l’attraction réciproque des sexes doit agir avec, dans toute sa force. Il n’est pas extraordinaire que les sens s’allument ; l’imagination, qui agit en même temps, répand un certain désordre dans toute la machine ; elle surprend le jugement, elle écarte l’attention, les femmes ne peuvent se rendre compte de ce qu’elles éprouvent, elles ignorent l’état où elles sont.

« Les médecins commissaires, présents et attentifs au traitement, ont observé avec soin ce qui s’y passe. Quand cette espèce de crise se prépare, le visage s’enflamme par degrés, l’œil devient ardent, et c’est le signe par lequel la nature annonce le désir. On voit la femme baisser la tête, porter la main au front et aux yeux pour les couvrir ; sa pudeur habituelle veille à son insu et lui inspire le soin de se cacher. Cependant la crise continue et l’œil se trouble : c’est un signe non équivoque du désordre total des sens. Ce désordre peut n’être point aperçu par celle qui l’éprouve, mais il n’a point échappé au regard observateur des médecins. Dès que ce signe a été manifeste, les paupières deviennent humides, la respiration est courte, entrecoupée ; la poitrine s’élève et s’abaisse rapidement ; les convulsions s’établissent, ainsi que les mouvements précipités et brusques, ou de membres, ou du corps tout entier. Chez les femmes vives et sensibles, le dernier degré, le terme de la plus douce des émotions, est souvent une convulsion ; à cet état succèdent la langueur, l’abattement, une sorte de sommeil des sens, qui est un repos nécessaire après une forte agitation.

« La preuve que cet état de convulsion, quelque extraordinaire qu’il paraisse à ceux qui l’observent, n’a rien de pénible, n’a rien que de naturel pour celles qui l’éprouvent, c’est que, dès qu’il a cessé, il n’en reste aucune trace fâcheuse. Le souvenir n’en est pas désagréable, les femmes s’en trouvent mieux et n’ont point de répugnance à le sentir de nouveau. Comme les émotions éprouvées sont les germes des affections et des penchants, on sent pourquoi celui