Page:Binet - Henri - La fatigue intellectuelle.djvu/344

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

chez certains surmenés et exister chez d’autres qui ne le sont pas. Le caractère distinctif du surmenage est dans le mode de réparation de la fatigue. Une fatigue normale est celle qui se répare d’elle-même, sans qu’on y songe, sans qu’on prenne de précautions spéciales, sans qu’on change la moindre partie de son hygiène. Au contraire, il y a surmenage toutes les fois que la fatigue qu’on éprouve exige pour sa réparation des conditions exceptionnelles. Ainsi, pour prendre un exemple qui nous fera bien comprendre, il est démontré par beaucoup d’expériences qu’après les classes du soir, les enfants de beaucoup d’écoles sont plus fatigués que le matin avant les classes ; et, soit dit en passant, les pédagogues qui ont fait cette constatation ont eu le tort d’en conclure que les enfants sont surmenés ; à ce compte on ne devrait plus faire travailler les enfants, car tout travail sérieux produit nécessairement un peu de fatigue ; mais la fatigue n’est pas le surmenage. Pour qu’on puisse affirmer que des enfants d’école sont surmenés, il faudrait montrer que la fatigue du soir ne se dissipe pas après le repos du soir et après le repos de la nuit, et que par exemple le lendemain matin les enfants qui se remettent au travail sont encore fatigués du travail de la veille, de sorte que la fatigue de la veille s’ajoute à la fatigue du moment et l’aggrave. Voilà un degré de fatigue qui nous semble pouvoir être considéré comme anormal, puisqu’il ne se dissipe pas de lui-même, et que pour le dissiper il faudrait donner aux enfants un repos supplémentaire, par conséquent modifier spécialement leur hygiène. Si des changements doivent en outre être apportés dans la nourriture, ou si des moyens thérapeutiques spéciaux doivent être employés pour réparer la fatigue, on peut encore dire qu’il y a surmenage. Mais nous ne voulons rien écrire là-dessus de définitif, parce que ce sont des problèmes qui ne se résolvent pas en théorie. C’est l’existence du problème que nous nous bornons à signaler.

Pour le résoudre expérimentalement, il faut le subdiviser