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son ouvrage populaire sur la Fatigue (p. 112 de la traduction française), Mosso admet que les phénomènes circulatoires n’ont pas, dans le travail intellectuel, l’importance qu’on leur a attribuée : « La cellule nerveuse, dit-il, a assez de matériaux de réserve pour subvenir aux actes de conscience sans avoir besoin d’une modification correspondante dans l’afflux du sang. On a vu, chez les personnes qui ont une lacune dans l’étendue des parois osseuses du crâne, le phénomène de l’attention commencer avant qu’il y eût le moindre changement dans la circulation cérébrale. »

C’est à cette conclusion que nous arrivons nous-mêmes d’une manière indépendante, en étudiant l’effet de la surprise sur le pouls de l’avant-bras ; ce n’est que deux secondes après qu’on a ressenti le choc de surprise que le pouls de l’avant-bras se modifie ; et, par conséquent, on ne saurait considérer avec Lange et James l’état de surprise comme ayant pour base la perception d’une modification vasomotrice. Enfin tout récemment Patrizi[1] a fait des expériences sur la circulation cérébrale pendant les temps de réaction, et les conclusions qu’il en tire sont une confirmation des précédentes. On sait que le tracé de la circulation cérébrale présente souvent de grandes ondulations, dites vaso-motrices, qui indiquent que la quantité de sang varie régulièrement d’un moment à l’autre dans l’organe. Patrizi inscrivait chez un jeune garçon atteint d’une brèche crânienne ces modifications de la circulation cérébrale, et en même temps il faisait faire à son sujet des temps de réaction. Lui-même donnait les signaux tout en surveillant la courbe circulatoire qui se traçait devant ses yeux sur un cylindre. Il avait soin de donner les signaux de réaction tantôt quand la courbe atteignait son maximum de hauteur, et tantôt quand la courbe descendait au minimum ; il pouvait ainsi avoir des temps de réaction exécutés

  1. Voir l’analyse dans l’Année psychologique, III, p. 359.