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LES IDÉES MODERNES SUR LES ENFANTS

distributions sont faites par le directeur de l’école après une enquête discrète sur la condition sociale des parents ; on connaît donc quels sont les parents les moins fortunés, on peut même établir des degrés d’infortune, et pour tout dire, des classes sociales. Or, en cherchant comment les enfants avancés et retardés physiquement se distribuent dans ces classes sociales, nous trouvons que les retardés sont en majorité dans les classes qui ont besoin d’assistance, soit de nourriture, soit de vêtement, soit des deux à la fois ; tandis que les réguliers et surtout les avancés physiquement appartiennent en majorité aux classes moins pauvres.

Voilà donc un fait bien démontré, malheureusement. Un bon nombre des enfants de corps chétif qui fréquentent nos écoles primaires publiques sont réduits à cet état, par suite de privations subies dans la famille, privations qui probablement portent à la fois sur la nourriture et sur l’hygiène. Et ce qu’il y a de plus grave encore, c’est que cette diminution de vigueur physique n’est pas un phénomène individuel, s’étant produit seulement chez les enfants, et dont on pourrait amener la suppression par une assistance attentive ; non, c’est bien réellement de la misère héréditaire, qui caractérise la famille pauvre, car ce n’est pas seulement l’enfant qui, lorsqu’on le mesure physiquement, se montre inférieur à la moyenne ; la même infériorité existe chez son père et chez sa mère. Nous avons prié ceux-ci par circulaire de nous envoyer leur mesure ; nous avons adressé cette demande à tous les parents des écoliers ; et les chiffres nombreux qui nous ont été envoyés, et dont, naturellement, nous ne pouvons attester que la valeur globale (car nous ignorons avec quel soin chaque parent a mesuré sa taille), nous montrent à l’évidence que déjà la taille des parents pauvres est légèrement au-dessous de la moyenne, tandis que celle des parents aisés