Page:Biographie des femmes auteurs contemporaines françaises.pdf/398

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de me présenter dans des pensions. Pauvre moyen ! Me voilà à visiter toutes les institutions de bel aspect, semées dans la rue de Vaugirard et alentour. J’en rapportai, non des espérances, mais la satisfaction d’avoir accompli un devoir envers mes enfants. J’ajournai une seconde et décisive démarche à huit jours : cette fois je n’en attendais rien de positif ; c’était un bien dont je me gratifiais, une complaisance pour mes scrupules, un repos donné à la conscience de la mère : «T ai fait tout ce que fai pu, tout ce que je, devais. La course fut im¬ mense ; Glichy, la Ghaussée-d’Ântin, le faubourg Pois¬ sonnière ; partout des refus exprimés avec une sécheresse polie, quelquefois avec un aimable intérêt. Gela m’était égal : j’y avais compté. La sensation dont je me suis défendue de toute l’énergie de ma volonté,.c’est le dé¬ couragement. Si l’on s’abandonne soi-même, on est perdu. Ges leçons si ardemment espérées ne venaient pas ; et Paris, avec son immensité, avec ses milliers de visages inconnus, me causait un effroi, dont seule je puis savoir l’étendue et la force. Je demandais des leçons, on m’offrait des livres à faire ; mais je n’osais pas compter exclusivement sur cette ressource : ma tête était d’ailleurs trop tourmentée. Le mal du pays vint mê¬ ler sa tristesse à mes craintes amères. Tous les motifs qui m’avaient exilée s’affriblissai ent sous l’infiiience de la réflexion douloureuse. Je ne comprenais plus com¬ ment j’avais pu quitter ceux qui me connaissaient, qui m’aimaient, pour venir me livrer avec les miens aux agitations d’un avenir froid et incertain. Un morceau de pain à Lyon, m’écriais-je dans mon angoisse, de la con¬ fiance et les joies de l’âme ! Que souvent j’ai interrogé mes petites pour savoir si elles aimaient Paris 1 Leur oui était pour moi un soulagement profond. Mais quand elles regrettaient les campagnes où elles s’éparpillaient.