Page:Biographie des femmes auteurs contemporaines françaises.pdf/397

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

vail n’était guère de mon goût, pourtant je le fis de mon mieux. J’attendis que les trois journées fussent passées pour présenter des lettres que m’avaient données des êtres plus prévoyants que moi. Alors je ne soupçonnais pas cette lutte honteuse de chacun contre tous. La pre¬ mière personne que je vis fut M œc la comtesse de Sussy. Cette première entrevue n’était pas de nature à me don¬ ner du courage, a Vous a-t-on poussée à Paris, ou vous y a-t-on attirée? » me demanda-t-elle avec son re¬ gard pénétrant^ et de cette voix que le sentiment ou la pensée ferme et profonde accentue toujours.—«On m’y a poussée, madame, » répondis-je en me donnant le calme dont je sais envelopper mes sourds désespoirs. — « Ah ! fit-elle, voilà le mal.» Ce qui suivit n’était pas moins terrible. Malgré cette franchise implacable, M me de Sussy me séduisit tout d’abord : elle a un charme si original, si varié d’idées et d’expressions!Et que son amitié délicate, chaleureusement active, me Ta rendue chère depuis ! La vie est d’ailleurs auprès d’elle, si douce, si facile ; elle a tant d’indulgence vraie ! La seconde personne qui eut ma douloureuse visite fut un banquier. 11 me conseilla avec une brusque loyauté de retourner à Lyon. — « Non, monsieur, lui dis-je d’un ton de froide résolution: quand on a fait cette démarche, on ne regarde pas derrière soi ; nous sommes ici, nous y resterons.—Je ne puis rien.— Vous pouvez beaucoup.—Faut-il que je parle de vous à la Bourse? » 11 était réellement ému. « Dans l’enfer, monsieur, si vous voulez. » Qu’a-, vais-je fait de ma fierté? l’inquiétude m’exaspérait. Les agents de change pleuvaient dans son cabinet. Au¬ cun de ces hommes ne pouvait m’être utile, je le sentais trop. Je me retirai. A un an delà, je ne l’avais vu qu’une fois, il se souvint de moi.

Un jour, que savais-je de ce Paris? il me prit l’idée