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Page:Biographie des femmes auteurs contemporaines françaises.pdf/453

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poésies où la jeune fille livrait au public les prémices de sa pensée. Ce volume fut distingué par la presse d’une manière toute particulière, au milieu du déluge d’écrits qui naissent et qui meurent sans toucher au rivage de la célébrité. Les journaux de province même, qui ne parlent des ouvrages que lorsque leur réputation a débordé jusqu’à eux, consacrèrent des articles d’éloges et parfois d’enthousiasme au joli volume de Rêveuse ; l’édition s’enleva rapidement, et, chose fort rare par le temps qui court, elle fut bientôt épuisée.

Ce succès est tout naturel : c’est qu’il règne dans tout le volume une mélancolie charmante ; c’est une voix qui parle pour les femmes et qui plaide éloquemment leur cause ; ce sont des pièces exquises de goût, de sensibilité et de poésie, ce sont enfin de petits chefs-d’œuvre de grâce et d’esprit. Nous n’avons besoin, pour prouver notre dire, que de rappeler Simple Amour, ou le Don, ravissante création comme idée et comme refrain, et sur laquelle M. Hippolyte Monpou a jeté la plus délicieuse de ses inspirations.

De même que les grands poëtes de notre époque reflètent le parti qu’ils ont embrassé, la plupart des femmes qui se livrent à la poésie reflètent elles-mêmes le poëte dont elles ont adopté l’esprit, la conviction. Mme Hermance Lesguillon ne tire son éclat que d’elle-même : Rêveuse n’a son type nulle part que dans l’âme de son auteur et des femmes qui éprouvent vivement leur destinée. Hermance est poëte, non parce qu’il y a de par le monde tel ou tel poëte qui a publié des volumes qui l’ont inspirée, mais parce qu’elle a pensé, souffert ; parce que tout langage veut une forme, parce que la forme de la méditation est la poésie ; parce que la poésie exige dans son enfantement une lenteur qui permet à l’âme ce charme si