Eh bien ! je t’aime encore, ô mer, quand je te vois
Comme un lion blessé qui bondit de colère, —
Se roule, se débat, redresse sa crinière
Et se met à rugir avec sa grande voix ! —
Ces magnifiques vers ne seraient-ils pas admirés dans les Orientales ? Mme Ségalas n’a-t-elle pas en elle quelque chose du génie de Victor Hugo ?
Enfin, Mme Ségalas est allée plus loin dans les deux Chodruc Duclos, et surtout dans les vers adressés à une Tête de mort: en lisant cette sublime et philosophique allocution, chacun pourra, comme nous, apprécier le rang que l’auteur doit prendre entre nos meilleurs poëtes.
A UNE TÊTE DE HORT 1 .
Squelette, qu’as-tu fait de Tâme?
Foyer, qu’as-tu Fait de ta flamme?
Cage muette » qu’as-tu fait De ton bel oiseau qui chantait?
Volcan, qu’as-tu fait de ta lave?
Qu’as-tu fait de ton maître, esclave?
Comme une souveraine avec toute sa cour.
Une âme t’habitait. Son cortège d’amour.
D’espoir, chantait, pleurait, et peuplait son domaine ;
Tu n’es plus qu’un désert : le lézard sous ton front S’établit ; l’âme a fui : le frêle moucheron S’introduit librement dans son château de reine.
Êtais-tu femme et belle, avec de longs cils noirs.
Des fleurs dans les cheveux, souriant aux miroirs ;
Grand seigneur, dépassant les tètes de la foule ;
Jeune homme, et délirant pour des yeux bruns ou bleus ? On ne sait : tous les morts se ressemblent entre eux ;
La vie a cent aspects, le néant n’a qu’un moule.
- Cette tâte de mort a été trouvée dans les mines du château royal du Vivier,
appartenant aujourd’hui à M» Parquin.